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Lucidor au cachot de Nabal (Voyages imaginaires, Voy. de la raison) - Marillier

Date :
1786
Nature de l'image :
Dessin (lavis)
Sujet de l'image :
Reserve 4-EF-79
LĂ©gende

Analyse

« Ce fut au milieu des modes qui nous tyrannisent, que la raison entreprit de nous visiter, & ce fut au printems de 1769 qu’elle exĂ©cuta ce gĂ©nĂ©reux dessein.
Voyons, dit-elle, si les lumiĂšres que j’ai dĂ©parties aux EuropĂ©ens, comme Ă  ceux d’entre les hommes que j’affectionne de prĂ©fĂ©rence, ne sont point obscurcies, & s’ils rĂ©vĂšrent encore mes loix. Aussi tĂŽt elle prit la taille & la physionomie d’un philosophe aimable, tel que Minerve parut aux yeux de TĂ©lĂ©maque, & elle s’achemina vers l’empire des Ottomans.
[
] Les premiers pays que Lucidor parcourut, (c’est le nom que la Raison se donna,) furent d’affreux dĂ©serts. Il eut occasion d’y voir un vieillards innocent, que le despotisme tenoit dans les fers. Il s’appeloit Nabal, & sur des dĂ©lations clandestines dont il ignoroit lui-mĂȘme le sujet, il Ă©toit condamnĂ© depuis trente ans Ă  vivre loin de sa famille, ou plutĂŽt du monde entier. 
[
] Il n’y a personne qui n’eĂ»t Ă©tĂ© attendri Ă  la vue du vĂ©nĂ©rable prisonnier. Outre une barbe plus blanche que l’yvoire, qui lui donnoit l’air de la candeur mĂȘme, il levoit continuellement les yeux au ciel, & le conjuroit avec la plus vive ardeur de pardonner Ă  ses dĂ©lateurs. Tout est pour le mieux, disoit-il, & la providence a ses desseins, lorsqu’elle me tient en captivitĂ©. J’avois une place brillante qui auroit pu m’éblouir, je ne m’occupe ici que de mon ame qu’il est impossible d’enchaĂźner. Je l’élĂšve au-dessus de ce corps que vous voyez captif, & je la promĂšne dans des espaces mille fois plus vastes que la Turquie.
Il n’y a ni prison ni exil pour une ame Ă©levĂ©e, lui rĂ©pliqua Lucidor, les murs tombent Ă  l’aspect d’un homme qui regarde la terre comme un atĂŽme, & qui ne tient qu’à son devoir. »

Annotations :

1. Au-dessus du dessin à gauche « voyage de la raison », à droite « n° 52. »
LĂ©gende dans le cartouche sous le dessin « Tout est pour le mieux, et la providence a ses desseins, orsqu’elle me tient en captivitĂ©. »

2. Gravure avant la p. 143 du volume 27 des Voyages imaginaires.

Sources textuelles :
[Caraccioli,] Voyage de la raison en Europe (1772)
Chapitre I, Lucidor commence ses voyages par la Turquie

Informations techniques

Notice #012405

Image HD

Identifiant historique :
B1724
Traitement de l'image :
Photographie numérique
Localisation de la reproduction :
Collection particuliĂšre (Cachan)