Supplice de la famille de Carle-Son (Juliette, V, fig. 44)
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Analyse
La scĂšne se passe Ă Naples. Le capitaine de Carle-Son livre aux libertins une famille, qui nâest autre que celle de Carle-Son : sa femme Rosine, Ă©pousĂ©e Ă Copenhague, deux filles, Christine et Ernelinde, et un fils, Francisque. Carle-Son tient Ă exprimer son dĂ©vouement : quâils en fassent absolument ce quâils en veulent ! (P. 1004.)
AprĂšs avoir Ă©tĂ© suppliciĂ©s, les quatre malheureux sont dressĂ©s sur la table, comme en apprĂȘt du souper, tandis que les libertins jouissent Ă terre sur des coussins.
« âRosine, prenez ce poignardâ, dit sĂ©vĂšrement le capitaine, âplongez-le dans le cĆur de votre fils, que son pĂšre lui-mĂȘme va tenir⊠â Non, barbareâ, sâĂ©cria cette mĂšre au dĂ©sespoir, et elle se perçait si je nâeusse retenu son bras. âAh ! garce, tu obĂ©irasâ, sâĂ©crie Carle-Son furieux, et saisissant la main de sa femme, il conduit lui-mĂȘme le poignard dans le sein de son fils. Clairwil, jalouse de voir quâon procĂšde sans elle au meurtre de ce jeune homme, elle qui ne respire que pour les meurtres masculins, saute sur un second poignard, et vient cribler ce malheureux de coups mille fois plus sanglants ; alors Rosine est couchĂ©e sur une banquette de bois, trĂšs Ă©troite, et lĂ Borchamps veut quâErnelinde ouvre, avec un scalpel, le ventre de sa mĂšre ; lâenfant se refuse, on la menace : effrayĂ©e, meurtrie, excitĂ©e par lâespoir de sauver sa vie si elle consent, sa main, conduite par celle de Carle-Son, cĂšde aux barbares impulsions quâon lui donne. âVoilĂ oĂč tu as reçu lâexistenceâ, dit ce pĂšre cruel, dĂšs que lâouverture est faite, âil faut que tu rentres dans la matrice dont tu es sortieâ ; on la garrotte, on la comprime tellement, quâĂ force dâart, la voilĂ toute vive dans les flancs qui la lancĂšrent autrefois. âPour celle-lĂ â, dit le capitaine, en parlant de Christine, âil faut la lier sur le dos de sa mĂšre ; voyezâ, dit-il quand cela est fait, âsâil est possible de rĂ©duire trois femmes en un si petit volume ! â Et Francisque, dit Clairwil ! â On te le donne, rĂ©pond Borchamps, va dans un coin lâexpĂ©dier Ă ta guise⊠â Suis-moi, Julietteâ, dit Clairwil en emmenant le jeune homme dans un cabinet voisin⊠et lĂ , comme des bacchantes effrĂ©nĂ©es, nous faisons expirer ce malheureux jeune homme, dans tout ce que la fĂ©rocitĂ© peut imaginer de plus cruel et de plus raffinĂ©. Carle-Son et Borchamps nous trouvĂšrent si belles au sortir de lĂ , que tous deux voulurent nous foutre ; mais la jalouse BorghĂšse sâĂ©crie quâil ne faut ni faire languir les victimes, ni retarder les plaisirs quâon attend de leur supplice ; on revient Ă cette opinion, et comme il est tard, on dĂ©cide que le souper sera servi en mĂȘme temps. âEn ce casâ, dit la BorghĂšse qui acquĂ©rait le droit dâordonner, nâayant point participĂ© aux tourments de Francisque, âil faut placer ces victimes, droites sur la table ; le premier de nos plaisirs dâabord, se recevra de lâĂ©tat oĂč elles sont, qui je crois, est des plus violents ; le second, de lâeffet des coups que nous leur porterons lĂ . â Oui, quâon les place, dit Clairwil ; mais je veux foutre avant que de souper. â Et avec qui, dis-je Ă mon amie, ils sont tous rendus. â Mon frĂšre, reprend lâinsatiable crĂ©ature, fais-nous venir les dix plus beaux soldats de ta troupe, et donnons-nous-en comme des garces.â La troupe paraĂźt ; BorghĂšse, Clairwil et moi, nous nous jetons en bravant les vits qui nous menacent, toutes trois Ă terre, sur des carreaux mis Ă dessein : Elise et Raimonde servent nos plaisirs. Sbrigani, le capitaine et Carle-Son sâenculent en nous regardant, et pendant quatre grandes heures, au bruit des lamentations de nos victimes, nous voilĂ toutes trois Ă foutre comme les plus grandes gueuses de lâunivers : nos champions, rendus, sont congĂ©diĂ©s. »
1. Au-dessus de la gravure à gauche « T. IX. », à droite « P. 228. »
Informations techniques
Notice #013666